La nouvelle forme de « collaboration » de l’Etat avec les investisseurs étrangers, qui engage une énorme superficie de terres malgaches fait encore l’objet de nombreuses critiques.
Après qu’un « accord-cadre » (« Memorandum of Understanding » ou MOU) ait été signé sur 60.000 ha de terres dans le Bas-Mangoky avec une grande société dénommée Elite Agro LLC basée à Abu Dhabi dans les Emirats Arabes Unis, le CRAAD-OI (Centre de Recherches et d’Appui pour les Alternatives de Développement – Océan Indien) et le Collectif TANY ont, par le biais d’un communiqué, dit non à la mise à disposition des 60.000 ha de terres à la société Emiratie Elite Agro LLC à Madagascar.
La production annuelle envisagée est de 350.000 tonnes de riz, 200.000 tonnes de maïs, 150.000 tonnes de blé au départ, et prévue d’atteindre 240.000 tonnes plus tard, 300.000 tonnes de soja, 20.000 tonnes de pois de cap et 30.000 tonnes d’arachide. Ce qui permettrait, dit-on, de réaliser l’Engagement du Président de la République sur l’autosuffisance alimentaire à Madagascar, notamment au cours de l’année 2020.
Toutefois, il convient de souligner comme le CRAAD-OI et le Collectif TANY l’ont précisé, l’autosuffisance alimentaire se définit par la « capacité d’un territoire à répondre aux besoins alimentaires de sa population par sa propre production et ses propres ressources ». Or c’est loin d’être le cas ici. Les intrants, le savoir-faire et les moyens matériels et financiers dans ce projet seraient apportés par ce groupe étranger. Autrement dit, même si la production du projet couvrira voire dépassera les besoins du pays en denrées rizicoles, on ne pourra jamais parler d’autosuffisance.
Quant à l’éventuel achat par l’Etat de toute la production à un prix modique pour approvisionner à la fois le marché local et l’exportation comme avancé, cela mérite réflexion à plus d’un titre. En effet, par la suite, la vente de cette production sur le marché intérieur impactera sur le prix du riz sur le marché national. Et là, toutes les précautions sont à prendre. Si le prix est trop bas, ce sont les cultivateurs locaux qui seront sanctionnés. Et si le prix est trop haut, ce sont les consommateurs qui en subiront les conséquences. Une telle production devrait servir à stabiliser le prix du riz sur le marché national.